Après avoir réussi à faire pression sur le gouvernement pour qu’il retire 2,7 milliards de dollars d’augmentations d’impôts proposées, de jeunes militants kenyans se tournent désormais vers des problèmes plus profonds tels que la corruption et la mauvaise gouvernance. Ce mouvement sans précédent a mobilisé les Kenyans au-delà des divisions ethniques et régionales sans leadership politique traditionnel, un changement radical par rapport à l’histoire du pays de protestations dirigées par l’élite qui se terminaient souvent par des accords de partage du pouvoir insatisfaisants.
Malgré la forte croissance économique du Kenya, de nombreux jeunes sont confrontés à de sombres perspectives d’emploi, ce qui alimente leur implication dans les manifestations. Le projet de loi de finances récemment abandonné, considéré comme le symptôme de problèmes systémiques plus larges, a galvanisé un mouvement diversifié et sans leader, largement organisé via les médias sociaux.
Les militants sont désormais confrontés au défi de maintenir l’unité et l’élan tout en s’attaquant à des objectifs plus larges. La récente offre de dialogue du président William Ruto, bien que manquant de détails, présente un autre dilemme : comment s’engager sans compromettre leurs principes. L’écrivain et activiste Nanjala Nyabola a souligné l’importance de répondre aux véritables griefs des manifestants afin d’éviter de nouveaux troubles.
Des débats internes ont éclaté sur l’orientation du mouvement. Christine Odera, coprésidente de la Coalition kényane pour la jeunesse, la paix et la sécurité, plaide en faveur de structures plus formelles pour dialoguer efficacement avec le gouvernement. En revanche, Ojango Omondi du groupe de travail des centres de justice sociale craint que la formalisation puisse conduire à une cooptation politique, plaidant plutôt pour la poursuite de l’activisme populaire.
L’unité du mouvement est également mise à l’épreuve par la gestion des tensions ethniques. À Eldoret, le fief politique de Ruto, des divisions sont apparues, certains groupes ethniques appelant à la fin des manifestations suite au retrait du projet de loi, tandis que d’autres exigent la poursuite de l’action jusqu’à la démission de Ruto.
Alors que le gouvernement se prépare à présenter un nouveau projet de loi de finances pour financer le prochain exercice budgétaire, les militants restent vigilants face à d’éventuelles augmentations d’impôts. L’unité et la résilience du mouvement dirigé par la jeunesse du Kenya seront cruciales pour relever ces défis économiques et politiques complexes.